Le projet de loi de finances 2018 adopté par le Conseil des ministres, mercredi dernier, prévoit plusieurs mesures fiscales et législatives, notamment la hausse des taxes appliquées aux carburants, aux tabacs et aux équipements. Le texte contient aussi des mesures favorables aux secteurs de l’habitat et de l’agriculture.

Ces nouvelles mesures traduisent la volonté des pouvoirs publics de pallier la baisse des recettes des exportations pétrolières et la contrainte de rationaliser et de maîtriser les dépenses publiques. En attendant son examen et son adoption par le parlement, voici les principales décisions prises par le gouvernement face à la grave crise financière qui frappe le pays.

Carburants : les nouveaux tarifs

La taxe sur les produits pétroliers (TPP) applicable sur les carburants sera augmentée. Il s’agit de la hausse de 5 DA/litre pour l’essence et de 2 DA/litre pour le gasoil. Ainsi, les nouveaux tarifs proposés par le gouvernement de la TPP en 2018 sera de 14 DA/litre pour l’essence super et sans plomb, de 13 DA/litre pour l’essence normale et de 4 DA pour le gasoil.
Les nouveaux prix à la pompe seront de 38,64 DA pour l’essence normale (contre 32,69 DA en 2017), de 41,67 DA pour l’essence super (contre 35,72 DA), de 41,28 DA pour l’essence sans plomb (contre 35,33 DA) et de 22,8 DA pour le gasoil (contre 20,42 DA).
Ces futurs prix sont calculés sans tenir compte des révisions éventuelles des marges par décision de l’Agence nationale de contrôle et de régulation des activités dans le domaine des hydrocarbures (ARH).
Pour le gouvernement, ce réajustement des prix des carburants vise principalement à rationaliser leur consommation, réduire leurs importations, augmenter les recettes fiscales, diminuer les subventions budgétaires, préserver l’environnement et endiguer le phénomène de la contrebande frontalière. Cette mesure générera ainsi des recettes supplémentaires de l’ordre de 61 milliards DA. Le gouvernement évoque à ce propos une consommation exagérée du carburant estimée à 14 millions de tonnes dont 9,7 millions de tonnes de gas-oil par an. Le taux du carburant importé est évalué à 23% de l’ensemble de la consommation nationale des produits pétroliers.
Notons que les prix du gaz butane et propane, ainsi que le GPL ne connaissent pas de changement en raison de leur caractère «moins polluant».

Environnement : impôts et des amendes

Le PLF 2018 a introduit de nouveaux impôts pour contrebalancer la chute des recettes fiscales pétrolières et préserver l’environnement. Dans le cadre de la préservation de l’environnement, il a été décidé de revoir à la hausse les taxes pour les activités polluantes, les eaux usées industrielles, les huiles usagées et les sacs en plastique. Il faut dire que les industriels en activité en Algérie ont détruit l’environnement provoquant de graves problèmes pour la société, citant l’exemple des oueds algériens non seulement asséchés, mais devenus des décharges et des «réservoirs» d’eaux usées et de rejets dangereux. La mer méditerranéenne est polluée à un niveau très alarmant par les industriels algériens, sans compter le phénomène des sacs noirs et les bouteilles en plastique qui sont jetés dans la nature et dans nos villes depuis des décennies.
Quant au tarif de la taxe additionnelle sur les produits tabagiques, il a été fixé à 21 DA par paquet, bourse ou boîte. Les 21 DA prélevés seront répartis à hauteur de 10 DA au budget de l’Etat, 6 DA au profit du Fonds pour les urgences et les activités de soins médicaux, 2 DA pour le Fonds national de sécurité sociale, 2 DA pour le Fonds de lutte contre le cancer et 1 DA pour le Fonds de solidarité nationale. La partie fixe de la Taxe intérieure de consommation (TIC) des différents tabacs a été révisée en hausse.
En outre, une taxe de domiciliation bancaire sur les opérations d’importation est instaurée pour un taux de 1% du montant de l’importation, et ce, pour toute demande de domiciliation d’une opération d’importation de marchandises, sans que le montant ne soit inférieur à 100 000 DA.

Impôt sur la fortune : qui est concerné ?

L’impôt sur la fortune a été introduit pour la première fois dans la législation algérienne. Le projet de loi de finances 2018 a précisé que les personnes qui seront assujetties sont celles qui détiennent un patrimoine d’une valeur supérieure à 50 millions DA. Le type de patrimoine assujetti, le barème et la destination des recettes provenant de cet impôt ont été également définis.
Le patrimoine soumis à cet impôt doit avoir une valeur supérieure à 50 millions DA. Les biens concernés sont essentiellement les biens immobiliers, les véhicules de particuliers d’une cylindrée supérieure à 2000 cm3 (essence) et de 2200 cm3 (gasoil), les yachts et bateaux de plaisance, les chevaux de course, les avions de tourisme, les objets d’art estimés à plus de
500 000 DA, les bijoux et pierreries, or et métaux précieux. Quant au tarif de taxation, il varie entre 1% et 3,5% en fonction du montant du patrimoine. La répartition des recettes issues de cet impôt est fixée à raison de 60% au budget de l’Etat, de 20% aux budgets communaux et de 20% au Fonds national du logement. L’impôt sur la fortune avait été institué par la loi de finances de 1993. Mais durant la dernière décennie, une demande incessante a été exprimée par des parlementaires visant à instituer un impôt sur la fortune. Dans cette optique, le gouvernement a proposé de changer l’appellation «impôt sur le patrimoine» en «impôt sur la fortune» dans le but «de permettre à l’opinion publique de mieux assimiler cet impôt qui touche la classe riche». Cependant, afin de permettre un meilleur rendement, le barème actuel qui régit l’impôt sur le patrimoine sera doublé pour l’impôt sur la fortune. A titre d’exemple, l’impôt dû au titre d’un patrimoine évalué à 350 millions DA sera de 5,25 millions DA au lieu de 2 millions DA payés selon le barème actuel, soit une plus value de 3,25 millions DA. Pour la mise en application de l’impôt sur la fortune, il est fait obligation aux concessionnaires automobiles de transmettre à l’administration fiscale un état détaillé (nom et adresse) des clients ayant acquis des véhicules de tourisme dont le prix dépasse 10 millions DA. Les bijoutiers doivent aussi transmettre au fisc un même état détaillé sur les clients ayant acquis des bijoux de luxe. Les commissaires-priseurs sont également soumis à cette même obligation pour leurs clients ayant acquis des objets de valeur par ventes aux enchères.
En outre, les douanes doivent transmettre périodiquement à l’administration fiscale un état détaillé des importations, faites par les particuliers, des véhicules dont la valeur dépasse les 10 millions DA, les yachts et bateaux de plaisance, les caravanes, les chevaux, les avions de tourisme, les bijoux, pierreries et les tableaux de maître.

Habitat et agriculture : un large soutien

Pour lutter contre le phénomène de la spéculation dans le foncier industriel, une pénalité est prévue. Une amende est prévue pour tout bénéficiaire de terrain à vocation industrielle mis sur le marché par voie de cession par des organismes publics ou par voie de concession par les Domaines, dans le cas où il demeure inexploité pour une période supérieure à 3 ans. Cette pénalité est fixée à 5% de la valeur vénale du foncier. Aussi, toute entreprise de production et de montage de véhicules lourds et légers, qui accuse du retard dans le respect des engagements qualitatifs, quantitatifs ou du rythme d’intégration nationale, s’expose au paiement d’une amende, avise le même texte.
Pour encourager les investissements dans la production des lampes LED qui consomment moins d’énergie, les droits de douanes appliqués à l’importation de cette catégorie de lampes seront augmentés à 30% contre 5% actuellement. Parmi les autres mesures destinées à soutenir les agriculteurs figure celle de l’exemption de la TVA, les opérations de vente de l’orge et du maïs ainsi que les autres matières destinées à l’alimentation du bétail. Cette mesure s’explique par le fait que la filiale de l’aliment du bétail est confrontée à d’énormes difficultés liées à la demande croissante des éleveurs pour ces produits et à la cherté de leur prix. Une telle situation a réduit considérablement l’accès des éleveurs aux aliments et a accentué la tension qui prévaut dans le secteur. A travers ce dispositif, il s’agit aussi de maintenir la dynamique de croissance de l’offre et d’encourager la production nationale de ces aliments de bétail. En ce qui concerne le logement public, le Trésor sera autorisé à prendre en charge des intérêts pendant la période de différé et la bonification à hauteur de 100% du taux d’intérêt des prêts accordés par les banques publiques dans le cadre de la réalisation de la 4e tranche de 120.000 logements de type location- vente (AADL). Dans le cadre du développement du commerce et des systèmes de paiement électronique, tout agent économique qui offre des biens ou services à des consommateurs doit mettre à leur disposition des terminaux de paiement électronique (TPE) pour leur permettre, à leur demande, de régler le montant de leurs achats par carte de paiement électronique. Ceci devra permettre, selon le gouvernement, l’essor du paiement électronique, l’amélioration de la traçabilité des paiements et le maintien des mouvements des fonds dans le circuit formel.

Budget sectoriels: La défense, l’intérieur et l’éducation en tête

La répartition du budget de fonctionnement prévu pour l’année 2018 n’a pas connu de grands changements par rapport à l’année en cours. En effet, la Défense nationale, qui vient en première position, bénéficie de la même dotation que celle de l’année 2017, à savoir un budget de 1118, 297 milliards de dinars (plus de 10 milliards de dollars). Le budget de l’Intérieur et des collectivités locales vient en seconde position, avec une hausse par rapport à l’année en cours, à savoir 425,57 milliards de dinars (394,26 mds). Le budget 2018 de l’Education nationale qui vient en troisième place a connu une baisse substantielle passant de 746,26 milliards DA à 709,55. Ceci s’explique par l’arrêt de la construction d’écoles et autres établissements, ainsi que la diminution des dépenses courantes.
Quant au secteur de la santé, il n’est pas touché par l’austérité. Bien au contraire, son budget est en hausse. Il est de 392,16 milliards DA, alors que cette année, il a bénéficié d’une enveloppe de 389,07 milliards DA. S’agissant des autres départements, il n’y a pas eu beaucoup de changements dont certains ont vu leurs dotations revues légèrement à la hausse, à l’exemple de l’industrie, de l’agriculture et de la communication.

Source: Le temps le 07-10-2017

Article précédentDes retards dans la réalisation des projets
Article suivantHabitat à Chlef: Plus de 13 900 chalets remplacés